Faisant preuve de créativité, la Cour de cassation vient de se prononcer dans un arrêt du 25 janvier 2023, (Cass. Soc. 25 janvier 2023, n°21-17.791), sur la suspension du délai de prescription en raison de l’état de santé.
Ainsi, elle juge que le salarié qui justifie par le biais de certificats médicaux, d’une hospitalisation s’étant suivie d’importants troubles anxio-dépressifs, l’empêchant de mener toute démarche personnelle, sociale ou administrative, constituait un cas de force majeure suspendant le délai de prescription.
Les faits
Dans ce contexte, l’employeur a formé un pourvoi en cassation.
L’avis de la Cour de cassation
La Cour de cassation donne raison à la cour d’appel et suit son raisonnement. En effet, à l’appui des certificats médicaux, elle indique que les troubles que subissait la salariée étaient si importants, qu’ils l’empêchaient d’effectuer toute démarche, qu’elle soit personnelle, sociale ou administrative, notamment la gestion de son dossier prud’homal.
Dès lors, l’action introduite par la salariée le 2 février 2018, 2 ans après la rupture son contrat de travail était alors recevable, la prescription ayant été suspendue.
La Cour de cassation élargit donc considérablement la possibilité d’agir en justice.
L’état de santé, ici les troubles anxio-dépressifs empêchant toute démarche administrative, peut constituer un cas de force majeure suspendant la prescription.
Rappel sur les durées de prescription de l’action en contestation de la rupture
Cet arrêt, qui pour la première fois, affirme que l’état de santé du salarié constitue un cas de force majeure et donc un cas de suspension du délai de prescription est l’occasion de revenir sur les délais de contestation.
Depuis les ordonnances Macron du 24 septembre 2017, toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par 12 mois à compter de la notification de la rupture (article L. 1471-1 du Code du travail).
Auparavant, le délai pour agir était de 2 ans.
Néanmoins, le délai de prescription peut être suspendu pour différentes raisons :
Il faut également souligner les délais de prescription spécifiques de 5 ans en matière de harcèlement moral/sexuel ainsi qu’en cas de discrimination.
Dans ce cas, la Cour de cassation a admis que la salariée demandant la nullité de son licenciement au motif d’actes de harcèlement a un délai de 5 ans pour saisir le conseil de prud’hommes à compter de la date de prononciation de son licenciement, peu important qu’elle se soit présentée avant cette date à l’inspection du travail pour indiquer avoir fait l’objet d’une forme de harcèlement moral sur son lieu de travail (Cass. soc., 9 juin 2021, n° 19-21.931).
La sécurisation du délai de contestation voulu par les ordonnances Macron est donc incertaine.
Lever systématiquement les provisions à l’issue du délai d’un an après la notification du licenciement peut donc s’avérer dangereux !