Les juges sont récemment venus se prononcer sur la question de la reconnaissance d’une faute inexcusable à l’égard d’un salarié victime d’un accident qui avait informé son employeur de son état de fatigue important.

Dans cette affaire, la Cour de cassation a considéré qu’il convient d’accorder le bénéfice de la faute inexcusable à un salarié victime d’un accident qui a signalé à son employeur son état de fatigue constituant un risque auquel il se trouvait exposé au regard de son poste de chauffeur (Cass. soc. 16 novembre 2023, n°22-10.357).

 

Les faits

 

Le raisonnement des juges

 

Ainsi, ayant retenu que le salarié, dont le poste de chauffeur nécessite un état de vigilance particulièrement soutenu, avait au préalable signalé à son employeur son état de fatigue important lié à l’absence de repos durant la nuit de nature à le mettre en danger, les juges ont décidé que son accident était de droit imputable à la faute inexcusable de l’employeur.

 

Rappel sur les conséquences de la faute inexcusable

Notre avis sur l’affaire

A notre sens cette décision est discutable à plusieurs égards :

  • D’une part, il nous semble essentiel de prendre en compte les circonstances du cas d’espèce qui ont permis aux juges de rendre une telle décision. En effet, ces derniers ont bien souligné la notion de risque au regard du poste de chauffeur occupé par le salarié, qui nécessite une vigilance particulière.
    Aussi, la raison de l’état de fatigue évoquée par le salarié semble avoir été prise en compte par la juridiction. En l’espèce, il est rappelé que le salarié avait passé une partie de la nuit aux urgences pédiatriques pour son enfant âgée de 14 mois.
  • D’autre part, les juges précisent qu’il n’était pas nécessaire de « rechercher si le salarié avait sollicité et encore moins exercé son droit de retrait ». Pourtant, pour rendre sa décision, la Cour se fonde expressément sur l’article L. 4131-4 du Code du travail qui accorde le bénéfice de la faute inexcusable de droit pour un travailleur ayant signalé à l’employeur un risque. Or, cet article figure dans le chapitre du Code du travail relatif aux droits d’alerte et de retrait. Le salarié n’ayant pas usé de son droit de retrait, il semble alors légitime de se questionner quant au bienfondé d’un tel raisonnement.

 

Conclusion

La responsabilité de l’employeur ne cesse d’être recherchée, voire élargie en matière d’accidents. Il doit donc rester vigilant en la matière.

Récemment, il a été reconnu la présomption d’accident du travail s’agissant d’un malaise survenu à un salarié lors d’un entretien dans le bureau de la responsable des ressources humaines, alors même que cet entretien s’était déroulé dans des conditions normales (Cass. 2e civ. 19 octobre 2013, n°22-13.275).