Dans un arrêt inédit rendu le 1er février 2023 (Cass. Soc. 1er février2023, n°21-15.371), la Cour de cassation s’est prononcée sur l’étendue de la latitude laissée aux partenaires sociaux dans la détermination des établissements distincts.
Elle juge que les signataires d’un accord collectif définissant dans l’entreprise le nombre et le périmètre des établissements distincts déterminent librement les critères permettant leur fixation au sein de l’entreprise, à la condition toutefois, qu’ils soient de nature à permettre la représentation de l’ensemble des salariés.
Les faits
Dans ce contexte, le syndicat SPAF a formé un pourvoi en cassation.
Rappel des modalités de négociation du périmètre de mise en place du CSE
- Le nombre et le périmètre des établissements distincts sont fixés par accord d’entreprise majoritaire négocié avec les organisations syndicales représentatives (article L.23 13-2CT).
- A défaut et en l’absence de délégué syndical, ils peuvent être déterminés par accord entre l’employeur et le CSE adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel du comité (article L.2313-3 CT).
- Si à l’issue d’une tentative loyale de négociation, aucun accord collectif n’a pu être conclu, l’employeur fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts, compte-tenu de l’autonomie de gestion du responsable de l’établissement, notamment en matière de gestion du personnel (article L.2313-4 CT).
Il résulte ainsi d’une lecture stricte de ces dispositions, que la loi n’exige pas, lorsque le nombre et le périmètre des établissements distincts sont fixés par accord collectif, la prise en compte de critères particuliers, de sorte qu’une pleine liberté serait accordée aux partenaires sociaux.
Il en va différemment lorsque la fixation résulte d’une décision unilatérale de l’employeur puisque le périmètre doit alors être défini au regard de l’autonomie de gestion du responsable de l’établissement, notamment (et pas exclusivement) en matière de gestion du personnel.
L’avis de la Cour de cassation
La Cour de cassation se prononce sur la question du contrôle pouvant être opéré par le juge concernant l’accord définissant dans l’entreprise le nombre et le périmètre des établissements distincts en suivant le raisonnement suivant :
- Le législateur n’a défini aucun critère à prendre en compte lorsque le nombre et le périmètre des établissements distincts sont déterminés par accord collectif, laissant ainsi entière liberté aux partenaires sociaux. Ce n’est qu’à l’égard de la décision unilatérale que le Code du travail prévoit un critère.
- La directive européenne 2002/14/CE du 11 mars 2002 prévoit expressément que « les États membres peuvent confier aux partenaires sociaux au niveau approprié, y compris au niveau de l’entreprise ou de l’établissement, le soin de définir librement et à tout moment par voie d’accord négocié les modalités d’information et de consultation des travailleurs », étant précisé que « la consultation s’effectue au niveau pertinent de direction et de représentation, en fonction du sujet traité ».
- Sur le fondement de l’alinéa 8 du préambule de la Constitution, elle en déduit qu’il est nécessaire que cette fixation soit de nature à permettre la représentation de l’ensemble des salariés.
Il s’évince du contrôle opéré par la Cour de cassation que la représentation de l’ensemble des salariés devra être effective.
En synthèse
La voie de la négociation est à privilégier dans la mesure où elle offre davantage de souplesse.