Un salarié directeur administratif embauché le 3 janvier 2013 quitte son employeur dans le cadre d’une convention de rupture conventionnelle, le 13 octobre 2015.
il saisit la juridiction prud’homale de demandes relatives à l’exécution du contrat de travail et plus particulièrement à des heures supplémentaires pour un montant de près de 50 000 € bruts, outre congés payés et contreparties obligatoires en repos.
Pour mémoire, dans le cadre d’un litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il n’appartient pas au salarié qui se prévaut du paiement de rappel d’heures supplémentaires de prouver l’existence, ni encore moins le nombre exact des heures supplémentaires effectuées.
En l’espèce, le salarié a présenté dans le cadre des débats des tableaux récapitulatifs des heures effectuées, des copies de son agenda journalier et des courriels précisant les heures d’envoi.
L’employeur en contestait la pertinence car ces pièces ne comportaient que quelques rendez-vous par semaine toujours en milieu de journée, avec en haut de chaque journée les horaires relevés de manière quasiment forfaitaire et sans aucune justification.
Quelques rappels s’imposent
En cas de litige relatif à
l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit
fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement
réalisés par le salarié au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié
à l’appui de sa demande.
Le juge forme sa conviction, après avoir ordonné en cas de besoin toutes les
mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent
pas selon le même horaire collectif, l’employeur doit établir des documents
nécessaires au décompte de la durée du travail, des repos compensateurs acquis
et de leur prise effective pour chacun des salariés.
À ce titre, l’article L. 3171- 3 du code du travail rappelle que l’employeur
tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les
documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque
salarié.
En l’espèce, la cour d’appel avait considéré que :
- les agendas produits ne constituaient pas des éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés et qu’en outre les courriels versés aux débats n’apportaient pas d’indication sur les horaires de travail de l’intéressé, ce dernier ne fournissant aucune explication sur son activité et l’organisation de celle-ci ;
- la cour retient encore les attestations produites quant au fait que le directeur administratif n’était jamais dans les locaux après 17h30.
La Cour de cassation considère au contraire que le salarié présentait des
éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre et que
d’autre part ce même employeur ne produisait aucun élément de contrôle de la
durée du travail.
La cour d’appel aurait dû examiner les pièces produites par le salarié.
Parallèlement et pour
échapper au débat relatif aux heures supplémentaires, l’employeur avait soutenu
que le Directeur administratif avait un statut de cadre dirigeant en
application de l’article L. 3111 du code du travail.
Or ce dernier a contesté avec succès ce statut notamment parce qu’il ne
participait pas à la stratégie de l’entreprise.
Là encore, les pièces versées aux débats et les éléments invoqués permettaient
d’établir que si le Directeur administratif dépendait du Président de
l’association et du Conseil d’administration et qu’il était habilité à prendre
des décisions de façon largement autonome, le statut de cadre dirigeant ne
pouvait lui être reconnu.
En l’absence de statut de cadre dirigeant et de convention de forfait, c’est
donc à bon droit que les premiers juges ont fait application des dispositions
relatives à la durée du travail.
Au regard des enjeux financiers en la matière et de charges sociales associées, il convient de mobiliser du temps et des moyens à la critique des pièces communiquées par le salarié afin de contester l’existence même ou le nombre d’heures supplémentaires réalisées.
Le juge se forgera sa conviction sur la qualité du débat contradictoire et l’argumentation développée par l’entreprise.