Une fois n’est pas coutume, un arrêt inédit de la chambre commerciale de la Cour de cassation a retenu toute notre attention (Cass.com. 9 novembre 2022, n°20-18.264).
Cette affaire portait sur l’obligation des organismes bancaires de mettre en garde la caution non avertie, lorsqu’au jour de son engagement, celui-ci n’est pas adapté aux capacités financières de la caution ou qu’il existe un risque d’endettement né de l’octroi d’un prêt garanti. Le caractère averti de la caution doit être apprécié in concreto.
Les faits et éléments de preuve
La Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la cour d’appel de Lyon du 11 juin 2020 en ce que la banque n’était pas tenue à un devoir de mise en garde à l’égard du dirigeant qui devait être considéré comme une caution avertie.
La conviction des juges s’est forgée sur des éléments de preuves issus de l’expérience acquise par la caution au cours de sa carrière salariée.
En effet, il résulte de la convention de rupture du contrat de travail produite aux débats, qu’entre le 1er mars 1983 et le 19 septembre 2007, la caution occupait au sein de la société Carrefour un poste de cadre dans la fonction d’expert achats.
Les juges constatent que son profil LinkedIn indique qu’il est titulaire d’une maîtrise en sciences économiques et gestion, dispose de compétencesen management, en « business développement », en « business analysis », en gestion d’équipe et en négociation, et a, au titre de son expérience en qualité de » responsable achats textiles chaussures » de la société Carrefour, piloté et arbitré les marchés chaussures, linge de maison, accessoires et bébés puériculture sur un plan commercial et financier, élaboré et mis en œuvre les plans d’action validés en s’appuyant sur une équipe de « category managers ».
Ainsi, les juges retiennent que, par sa formation, son expérience professionnelle et ses compétences, la caution était apte à évaluer les risques propres à la garantie qu’il avait apportée au projet de la société Tasc and Co, société qu’il a créé et dont il a pris la Direction pour exploiter une activité de restauration de pizzerias.
Cette décision est intéressante, elle pourrait être utilisée par l’employeur dans le cadre de procédures en matière d’insuffisance professionnelle ou de résultats.
En effet, l’expérience professionnelle et les compétences mises en avant par un candidat sur un réseau professionnel comme LinkedIn pourraient alors être mobilisées pour justifier des attentes légitimes d’un nouvel employeur dans le prise de poste et les résultats attendus.
Quand les réseaux sociaux s’invitent dans les relations de travail …
Mais ce mode de preuve n’est pas toujours jugé recevable.
Ainsi, dans un arrêt du 20 décembre 2017 (Cass. soc. 20 décembre 2017, n°16-19.609), la Cour de cassation a jugé que l’employeur ne peut utiliser les informations recueillies sur le profil Facebook d’une salariée, en utilisant le portable professionnel d’un autre salarié, alors que ces informations étaient réservées aux personnes autorisées par l’intéressée. L’employeur ne pouvait y accéder sans porter une atteinte disproportionnée et déloyale à sa vie privée.
Plus que jamais l’utilisation des données personnelles et leur protection est un enjeu d’entreprise.
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